L'offre de vêtements grande taille reste encore largement sous-développée en France, alors que le marché concernerait plus de 25 % des femmes. Des marques émergent sur le canal e-commerce avec une proposition plus qualitative que les acteurs de la fast fashion. Certaines affichent même un positionnement écoresponsable.
L'offre de vêtements grande taille reste encore largement sous-développée en France, alors que le marché concernerait plus de 25% des femmes. Des marques émergent sur le canal e-commerce avec une proposition plus qualitative que les acteurs de la fast fashion. Certaines affichent même un positionnement écoresponsable.
Par Justine Carrel - Publié le 13/03/23
Le marché français de la mode grande taille demeure encore une niche alors qu'il concerne pourtant 25 % des Françaises, d'après la dernière campagne nationale de mensuration, en 2006. 80 % des femmes qui s’habillent en taille 42 et plus se sentent discriminées par les marques de vêtements, affirmait une étude réalisée par le site The Body Optimist, en 2018. Mais des changements sont à l'œuvre depuis quelques années. Avec la montée du mouvement Body Positive, de nombreux acteurs de l'habillement adoptent le concept d'inclusivité pour offrir des produits et des styles qui répondent mieux aux besoins de tous les profils de clients.
L'offre se développe grâce au e-commerce
Nike, Anthropologie, ou encore Reformation font partie des marques engagées. Mais en France, l'offre grande taille reste essentiellement portée par la fast fashion entrée-de-gamme, uniquement disponible sur Internet. H & M (la marque a retiré le rayon grande taille de ses magasins pour vendre ses collections uniquement en ligne), Asos, Pretty Little Thing ou encore Shein s'imposent comme les grands gagnants en termes de volumes de ventes.
Le marché des vêtements grande taille s'est davantage développé sur la catégorie femme que sur les autres marchés. Cela remonte aux années 90, lorsque la marque britannique de vêtements pour femmes Evans est devenue un leader du marché avec des vêtements allant au-delà de la taille 42, selon le site Fashionunited.fr. Aujourd'hui, Evans vend exclusivement en ligne et propose des vêtements, de la lingerie et des chaussures grande taille. Un autre détaillant britannique, SimplyBe, fait figure de pionnier. Il est présent depuis le début des années 2020 avec son site marchand qui propose un assortiment complet de marques en plus de sa marque propre.
Le e-commerce a offert un nouveau canal d'achat aux clients qui peinaient à trouver des vêtements grande taille. Plus les consommatrices ont besoin d'une grande taille, plus la proportion de vêtements achetés en ligne est élevée, révélait l'étude de The Body Optimist. Les femmes qui portent des tailles 38/40 composent leur dressing via Internet à 25%. Celles qui font du 50/52 sont contraintes à 50 % d’avoir recours à l’achat en ligne pour trouver des pièces qui leur conviennent. Il y a donc un réel contraste entre l’offre disponible et la demande, qui ne cesse d’augmenter. Et même sur Internet, l'offre reste encore insuffisamment étendue.
De jeunes marques responsables émergent
Lorsqu’il s’agit de mode responsable, l’offre est encore plus limitée. Toutefois, depuis quelques saisons, des petites marques aux aspirations inclusives et aux préoccupations environnementales apparaissent en France. Elles ont généralement été créées par des femmes qui ne se satisfaisaient pas d'une offre jugée soit trop bas de gamme, soit beaucoup trop chère pour elles. Dans le domaine du luxe, Marina Rinaldi, marque italienne appartenant à Max Mara, a été la première griffe à introduire l'expression " taglia comoda", qui signifie taille confortable.
En France, Emmanuelle Szerer a lancé en 2017 la marque Almé. Celle-ci propose des collections de prêt-à-porter féminin allant du 36 au 56. En juin 2021, elle a bouclé une levée de fonds d'un million d'euros. "Nous avons beaucoup d'ingénieurs au capital, des gens qui ne s'intéressent pas particulièrement au produit mais voient qu'habiller les femmes, peu importe leur taille, c'est rentable", expliquait alors Emmanuelle Szerer. Parmi les business angels séduits par ce projet d’une mode inclusive milieu de gamme et tendance, se trouvent notamment Chantal Baudron, spécialiste en recrutement dans la mode, et Damien du Fretay, ex-PriceMinister. Almé s’est fixé comme objectif de réaliser 6 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel d'ici la fin 2023. La crise sanitaire de Covid-19 n’a pas freiné sa progression, au contraire. Elle fait confectionner ses produits majoritairement en France (plus de 70%), ou dans le bassin méditerranéen (au Portugal ou en Turquie). La marque généralise le principe de la précommande en début de saison (cinq semaines maximum de délai pour les clientes), ce qui lui permet de ne pas créer de surstock en évaluant l’appétit de ses adeptes pour certains articles qui pourront ensuite être produits à plus grande échelle.