Sous-traitant de la chimie pharmaceutique, Seqens, âgé d’une vingtaine d’années, est un symbole dans la reconquête de la souveraineté sanitaire de la France. Engagé dans la relocalisation de la production de paracétamol en France, il opère en parallèle une diversification dans les biothérapies.
Sous-traitant de la chimie pharmaceutique, Seqens, âgé d’une vingtaine d’années, est un symbole dans la reconquête de la souveraineté sanitaire de la France. Engagé dans la relocalisation de la production de paracétamol en France, il opère en parallèle une diversification dans les biothérapies.
Par Chrystèle Reynier - Publié le 07/02/24
Seqens, créé en 2003 via la reprise d’anciens actifs chimiques de Rhodia, est devenu en une vingtaine d’années l’un des cinq plus gros sous-traitants mondiaux de chimie pharmaceutique selon le journal Les Échos. En 2023, l’entreprise représentait un CA de 1,4 milliard d’euros avec 3500 salariés (dont 1800 en France), 24 sites de production (8 en France) et 10 centres de R&D.
Une usine française de paracétamol d’ici 2025
Seqens représente une entreprise emblématique dans la relocalisation de la production de médicaments en France, à travers son projet de construction d’une unité de paracétamol à Roussillon en Isère à l’horizon 2025. Le projet a été lancé en 2020, après l’annonce par Emmanuel Macron de son souhait de restaurer la souveraineté sanitaire du pays. Le paracétamol n’était plus produit en France depuis 2008, date de la fermeture de l’usine de Rhodia.
Dotée une capacité de production de 15 000 tonnes par an, cette usine pourra couvrir la moitié des besoins en paracétamol de l’Europe. Cette capacité de production représente trois fois la demande française et prend place sur un marché annuel évalué à 180 000 tonnes, selon L’Usine nouvelle.
Le projet de réindustrialisation coûte environ 100 millions d’euros, dont près d’un tiers financé par l’Etat. "Sans cette subvention, nous ne l’aurions jamais fait", a avoué Pierre Luzeau, président de Seqens, auprès du journal Le Monde. Le projet a également pour partenaires Sanofi (Doliprane) et Upsa (Dafalgan et Efferalgan). Tous deux producteurs de spécialités à base de paracétamol, ils se sont engagés sur des contrats à long terme. La mise en place du projet a également reposé sur une troisième condition : sa compétitivité ; un sujet maîtrisé par Seqens, qui détient également une usine en Chine, souligne L’Usine nouvelle.
Pour la production de son principe actif, le site isérois aura recours à l’automatisation et à la chimie en flux continu. Le procédé, mis au point sur le site de Porcheville, a nécessité 18 mois de R&D. Il permettra "une production rentable, avec une empreinte environnementale très largement réduite : -75% d’émissions de CO2, -65% de consommation d’énergie, élimination des effluents et quasi-élimination des déchets", explique l’entreprise.
"L’objectif est de réussir cette réindustrialisation de manière la plus verte possible, qu’elle soit innovante, performante et compétitive pour assurer sa pérennité", a commenté Robert Monti, directeur général des activités aspirine et paracétamol de l’entreprise, auprès de L’Usine nouvelle. Le site de Roussillon devrait être mis en service fin 2024 avec de premiers lots commerciaux attendus d’ici fin 2025 ou début 2026.
Une diversification dans les médicaments biologiques
En parallèle, Seqens se démarque par son orientation vers les produits biologiques issus du vivant. L’entreprise a officialisé en novembre 2023 la reprise de l’usine de bioproduction CellForCure des Ulis (Essonne), vendue par le groupe pharmaceutique suisse Novartis. Ce site est stratégique pour la production de biomédicaments en France. Créé en 2013 par le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) et acquis en 2019 par Novartis, "il se repositionnera à nouveau comme un centre spécifique de production à façon [après avoir été consacré à la production de Novartis pendant un temps], que ce soit pour le développement ou la fabrication jusqu’à l’échelle commerciale de biomédicaments, pour le compte de laboratoires académiques, d’entreprises de biotechnologies ou de grands groupes pharmaceutiques", explique L’Usine nouvelle.
Dans le domaine de la bioproduction (défini comme l’ensemble des procédés et biotechnologies permettant de produire des biomédicaments), le besoin est grand. La biotechnologie permettra à l’avenir de traiter de nombreuses pathologies, notamment dans le domaine de l’oncologie. Les biomédicaments représentent actuellement la moitié des médicaments en développement dans le monde. Dans ce domaine, la France est en retard. Seulement 8 des 76 biomédicaments commercialisés en Europe sont produits en France.
Pour Seqens, le rachat du site CellForCure des Ulis marque un "premier pas" vers les thérapies cellulaires et géniques, soit un complément stratégique de ses activités. "L'objectif est de faire de Seqens le sous-traitant le plus complet du marché, avec une offre continue de la chimie à la biologie d'ici à trois ans" a annoncé Pierre Luzeau. L’entreprise entend se doter d’autres technologies de production dans les trois prochaines années, note le journal Les Échos.
Principales sources utilisées pour la rédaction de cet article :
· Chaffin Zeliha, "Produire des médicaments en France, une difficile reconquête sanitaire", lemonde.fr, 9 janvier 2023
· Chauvot Myriam, "Champion de la relocalisation des médicaments, Seqens se lance dans les biothérapies", lesechos.fr, 4 octobre 2023
· Chauvot Myriam, "Pharmacie : Pierre Luzeau, PDG de Seqens, le champion de la relocalisation", lesechos.fr, 22 décembre 2023
· Cottineau Julien, "Aux Ulis, Seqens succède à Novartis pour l’usine CellForCure, spécialiste des biomédicaments", usinenouvelle.com, 27 novembre 2023
· Cottineau Julien, "Bioproduction, le grand défi de la pharma en France", usinenouvelle.com, 14 juin 2019
· Cottineau Julien, "Produire 20 biomédicaments en France en 2030, un défi pharmaceutique gigantesque", usinenouvelle.com, 13 octobre 2021
· Cottineau Julien, "Seqens, retour vers le futur paracétamol", L'Usine nouvelle, avril 2023